Grenoble : des études payantes, une semaine complexe.. un projet périscolaire incohérent

La réforme des rythmes scolaires a considérablement bouleversé le rôle éducatif des communes.
Aux côtés de leur charge obligatoire liée à l’entretien des bâtiments scolaires, les villes ont été investies d’une nouvelle mission, celle de contribuer à la réussite éducative des enfants pendant le temps périscolaire. Auparavant cette fonction était dévolue aux seules MJC et associations d’éducation populaire, qui accueillaient les enfants après l’école et pendant les congés.
Depuis 2013, les villes ont la charge de 3 à 5h par jour d’activités périscolaires, soit presqu’autant que d’heures de classe. Chacune expérimente, à sa façon, des formules plus ou moins novatrices, à l’aune de leur priorité politique en terme d’éducation… et de leur capacité financière.

En 2013, Grenoble avait fait le choix ambitieux d’investir 3M€ supplémentaires pour : démultiplier le nombre d’animateurs, /mettre une Atsem par classe / diminuer de moitié les taux d’encadrement /et créer des « animateurs référents » véritables chefs d’équipe des temps périscolaires dans chacune des écoles… tout en maintenant une gratuité complète de 16h à 17h30 autour des activités récréative et accompagnement scolaire.
Afin de soutenir, notamment les enfants les plus en difficulté, l’objectif a été de considérer tous les temps autour de l’école, (accueil du matin, cantine et accueil du soir) comme des moments d’apprentissage ayant un rôle pour la réussite éducative de l’enfant. Avec en perspective, une montée en charge progressive de la qualité des activités et de la formation des animateurs. A moyen terme, il avait été envisagé que ces temps périscolaires puissent devenir de nouveaux territoires d’expérimentation éducative.

Le nouveau projet de la majorité Grenobloise en place, soumit à votation au mois de Janvier 2016, remet en cause gravement une partie de ces choix. Il propose :
Une semaine de l’enfant fractionnée. Des horaires de classe éclatés, voir même différents entre maternelle et élémentaire et entre quartiers, un périscolaire dit « de qualité » 1 jour/2 et pour le reste une garderie payante avec un taux d’encadrement à la hausse.
Des études du soir payantes. En effet outre les 3H « Peillon »/hebdomadaires, les autres accueils du soir c’est-à-dire 6h par semaine ( et donc les études) deviendront payantes sous forme de garderie… ce qui n’a jamais été fait à Grenoble.

Ces 2 propositions sont dommageables à plusieurs titres :
1. Nous avons besoin d’horaires scolaires simples et structurants pour les enfants mais aussi pour les enseignants, les familles et les associations. Des journées scolaires de 8h30 à 16h pour toute la ville, comme actuellement, permettent cette simplicité. Les enfants auront ensuite le temps au collège de vivre un emploi du temps décloisonné. Seul le scénario A offre partiellement cette possibilité.

2. Il faut défendre la gratuité du périscolaire. Si la ville veut contribuer, aux côtés de l’école, à la réussite éducative des enfants elle doit en priorité soutenir les enfants les plus en difficulté. A Grenoble 2500 enfants sont dans cette situation. De ce point de vue, son rôle est fondamental dans l’accompagnement scolaire, c’est-à-dire les études du soir faites en partie par des enseignants (payés par la ville). Même si les devoirs sont interdits en France, nous savons qu’ils restent la norme. Les enquêtes internationales PISA nous confirment que la capacité d’accompagnement des familles reste encore un facteur essentiel de la réussite scolaire ( pour 28% en France contre 15% ailleurs en Europe). Comme cette période des devoirs n’est pas assurée directement en classe, les villes en ont la charge et doivent l’assumer. C’est pour cette raison que les études doivent absolument rester gratuites, afin de laisser une chance aux familles modestes d’en profiter.

D’ailleurs comme l’a signalé un parent lors d’une réunion à la Mairie :  » vous n’augmentez pas les impôts locaux, mais en faisant payer l’accueil du soir et les études, c’est exactement comme si vous les augmentiez de 5%« . Que devient alors l’objectif affiché de « lutter contre les inégalités sociales » si l’offre périscolaire gratuite du soir est supprimée ? Qu’en est-il alors du « bouclier social »?  Nous craignons que ce choix ait été uniquement dicté par des considérations financières, aux dépends de la bourse des familles. Il serait regrettable que les contraintes économiques se fasse au détriment des choix éducatifs.

° Pour information sur la votation, vous pouvez consulter le site de la ville de Grenoble et l’article paru dans Place Gre’net : « Rythmes scolaires : Les parents partiellement consultés »
http://www.placegrenet.fr/2015/12/29/rythmes-scolaires-a-grenoble-parents-consultes/72432

° Nous reproduisons d’autre part, ci-dessous, des extraits d’un courrier envoyé aux 2 élus chargés du dossier, par un groupe de parents d’élèves grenoblois, qui a le mérite de poser de nombreuses questions encore très floues. collectif.gratuiteperiscolaire@gmail.com

…/…
Nous vous transmettons ici nos interrogations et notre avis sur certains points, mais nous devons vous avouer que beaucoup de parents sont épuisés de toutes ces réunions, d’autant plus que nous avons l’impression que tout est déjà (quasi) décidé d’avance.

…/…
Cette consultation est la bienvenue.
Nous nous demandons par contre sur quels constats et évaluations elle repose et pourquoi on ne nous demande pas notre avis sur le maintien de l’organisation actuelle et sur la gratuité ou pas, de l’ensemble des temps périscolaires du soir.

Pour expliquer le changement vous avez avancé plusieurs arguments :
– Une journée de l’enfant trop longue… mais alors, pourquoi rallonger l’offre jusqu’à 18h ?
– Une faible fréquentation des ateliers éducatifs payants…est-ce une raison, alors, pour rendre payantes les études du soir ?
– Lutter contre les inégalités sociales…mais une tarification (même au QF) est-elle plus juste que la gratuité actuelle ?
– Prendre en compte le rythme des enfants de la maternelle…mais pas aux dépends de la qualité de la sieste et des horaires de vie des familles.
– Une meilleure professionnalisation des animateurs… n’est ce pas sur l’embauche et la formation qu’il faut agir et non sur les horaires des familles ?

Si nous devons nous prononcer sur 2 projets, nous n’avons par contre, pas notre mot à dire sur l’organisation et le coût du périscolaire, car il semble déjà décidé à l’avance.
En effet, alors que le périscolaire après l’école est gratuit actuellement de 16h à 17h30 pour tous…  votre projet prévoit que seules 3h resteront gratuites, et que les 6h autres deviendront des garderies payantes (si 2€/h soit environ 432€/an sur 36 semaines).
Quoi qu’il arrive de la votation, les horaires périscolaires seront compliqués et différents pour 2 parties de la ville, créant ainsi une séparation entre les quartiers.

Plusieurs questions restent encore, pour nous sans réponses :

° Quitte à rallonger la journée de l’enfant pourquoi ne pas aller jusqu’à 18h 30 ?
° Les études vont-elle devenir payantes ? Et pour quelles raisons ?
° Accueil du soir payant : quel sera le taux d’encadrement ? Reviendra-t-il aux anciens critères d’avant 2013, à savoir un animateur pour 25 enfants ?
° Que deviendront les enfants des parents qui ne pourront pas payer ?
° Quel sera le contenu des 3h gratuites ?
° Que vont devenir les ateliers éducatifs ?
° Les animateurs du « gratuit » seront-ils les mêmes que ceux du « payant » ?
° Quelle cohérence dans la continuité entre 3h gratuite dites « de qualité » et 6h de garderie payantes mais de moindre qualité ?

° Scénario A : quel découpage dans la ville entre les 2 formules ?
° Scénario C : nous avions massivement rejeté l’allongement de la pause méridienne, en 2009 et lors des rencontres 2015, pourquoi y revenir dans ce scénario ?
° Scénario C : la différence d’horaire maternelle et élémentaire va nous poser de nombreux problèmes de garde.
° Scénario C : A quoi rime 3/4h de périscolaire après la cantine des petits ? Quelle différence d’activités avec la classe ? Comment fonctionnera la sieste ? Quel rôle des Atsem pour qui ce moment est un moment de repos ?

…/…

 

One Comment