Retour sur le Plan Stratégique du CCAS 2015-2019

Lors du Conseil Municipal du 20 Juillet 2015, l’Analyse des Besoins Sociaux 2014, ainsi que le Plan stratégique 2015-2019 du CCAS nous ont été présentés , sans vote. Vous trouverez les liens utiles en fin de page.

Voici l’intervention de Paul Bron au titre de GO Citoyenneté.

 

« Il est toujours très intéressant de lire l’Analyse des Besoins Sociaux que produit le CCAS chaque année. Il nous donne une image de notre ville qui doit mobiliser les élus et particulièrement la majorité municipale, pour orienter sa politique en direction de la lutte contre les inégalités sociales.

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Que pouvons-nous lire de notre ville aujourd’hui :
Grenoble est une ville pleine de contrastes, marquée par une hausse des inégalités sociales, économiques et scolaires.
Grenoble est une ville jeune : 46 % des habitants ont entre 0 et 30 ans.  Mais 20% ont plus de 60 ans et la proportion de personnes âgées est en forte croissance.
C’est une ville avec de fortes disparités entre les quartiers : Les secteurs du nord de la ville se distinguent par une haute proportion de jeunes adultes, de ménages vivant seuls et de cadres. Les secteurs Sud de la ville c’est à dire au sud des grands boulevards, par une surreprésentation des personnes âgées, des familles avec enfants, et des ouvriers.

C’est donc une ville qui reste socialement fragile. Malgré un fort développement économique. 22% des familles grenobloises vivent en dessous du seuil de pauvreté, c’est à dire à 982€ par mois pour une personne seule.
Et d’autres signes de fragilité apparaissent, à l’image de la plupart des grandes villes : surendettement, renoncements aux soins ou encore non recours parfois aux droits sociaux.
Ces difficultés actuelles touchent particulièrement les femmes, les jeunes, mais également les personnes âgées.
Ainsi contrairement à une idée reçue, la pauvreté n’est pas massive à Grenoble. On n’assiste moins à une hausse de la pauvreté qu’à une hausse des inégalités. Ce qui caractérise cette ville, ce sont les inégalités socioéconomiques, la coexistence entre des habitants aux niveaux de revenus hétérogènes, parfois dans des mêmes quartiers comme en centre-ville.
Un autre contraste concerne les diplômes. L’élévation des niveaux de diplôme est un changement invisible mais profond de la physionomie de la ville, avec des disparités s’accentuant entre le nord et le sud.

Ces constats ne sont pas nouveaux, mais ils militent encore plus pour une politique municipale qui soutienne et développe son CCAS.
Et c’est bien ce qui s’est passé tout au cours du mandat précédent, avec un soutien renforcé de la ville à hauteur de 700 000€ chaque année, le CCAS a pu en poursuivre une politique de redistribution et d’innovation sociale.

Ainsi le Plan stratégique 2015 du CCAS que nous est présenté aujourd’hui par la majorité doit être imprégné tout autant de la lutte contre l’augmentation de la précarité et les inégalités sociales que des nombreuses innovations qui ont marqué les années passées.

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Quels constats pouvons-nous tirer de ce texte :
Tout d’abord saluons le travail accompli par les élus, les associations, les personnes qualifiées et les agents du CCAS qui se sont impliqués dans les différents groupes de travail. Soulignons de même votre proposition, en conseil, de séminaire public sur ce sujet.

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Mais reprenons plus en détail ce document.

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1. Le plan insiste sur une approche conceptuelle basée sur la défense des droits plutôt que sur une logique d’accès aux droits. C’est un sujet majeur. Je ne sais pas si les participants aux groupes de travail, ont vraiment abordé ce sujet ou si ce sont les rédacteurs qui ont pris l’initiative de cette orientation.
Il est bien sur évident que l’action sociale doit faire reconnaitre et défendre les droits des personnes. Mais il faut rester vigilant et ne pas réduire l’action sociale à la défense des droits. Au delà du droit, il existe des situations humaines, de précarité, de pauvreté de difficultés familiales ou éducatives, qui ne se caractérisent pas forcément par l’accès à un droit reconnu. Au delà du droit, il existe des dynamiques collectives de solidarité, de développement social qu’un CCAS doit pouvoir accompagner, promouvoir et dynamiser. Au delà de l’affirmation de l’égalité, il faut mettre en avant l’équité, qui est la meilleure façon de lutter contre le manque d’égalité.

2. Le choix stratégique de ce plan a été de se distinguer d’un plan d’actions qui alignerait un « catalogue » comme il est dit en p5. Mais je crains que vous ne soyez tombé dans l’excès inverse. Celui d’aligner de beaux principes, généreux, que nous partagerons d‘ailleurs tous ou presque, qui donnent certes des orientations, une ligne de conduite, un fil rouge.
Mais nous savons que le plus difficile dans l’action politique, ce n’est pas d’afficher de belles idées mais de les mettre en œuvre et de les financer.
Et sur ce point c’est la déception … Peu de propositions concrètes et aucun axe de financement. Tout cela est, encore une fois, renvoyé à plus tard.
Au fil du document j’ai cherché et malgré tout, recensé les quelques actions nouvelles que vous allez créer : une équipe juridique mobile, un forum des droits, un coup de pouce jeune, un 6eme relai d’assistantes maternelles…. Il n’y a pas d’action majeure qui me permette de dire : « ah oui la majorité avance, elle construit enfin un vrai bouclier social.. »

3. Je voudrais ensuite vous poser 2 questions sur la petite enfance.

Le développement du langage avant 3 ans, avant l’entrée à l’école est un élément capital de la réussite scolaire. Vous dites vouloir en faire, vous aussi, une priorité. C’est très bien. Mais sur quelles bases, autour de quels projets ?.
Il a été démontré que certains enfants de 3 ans, de familles populaires, qui n’ont pas fréquenté de structure collective, ont 9 mois de retard quand ils arrivent à l’école, dans l’acquisition du langage, par rapport à des enfants de parents cadres.
Comment compter vous concrètement accompagner l’apprentissage de la langue des enfants de moins de 3 ans ?.
Le programme Parler Bambin, dans les crèches, même avec toutes ses contraintes, constituait une réponse qualitative et appropriée et qui dépassait les bons sentiments. En l’abandonnant, vous mettez de côté une initiative forte, de qualité, et reconnue comme telle. Quel bilan en avez-vous donc fait pour aboutir à ce renoncement ?

– Aucune mention de la « classe passerelle » une expérimentation intéressante que nous avons mis en place à l’école Léon Jouhaux dans un partenariat Ville/ CCAS / EN et qui constituait un sas d’entrée à l’école maternelle pour les enfants de 2 à 3 ans. Une structure qui accueille 18 enfants, encadrée par 3 professionnelles : une enseignante, une Atsem et une éducatrice de jeunes enfants, avec une forte participation des parents. Et qui a démontré toute sa pertinence puisqu’elle a été reprise dans le plan national  de « refondation de l’école« . Nous envisagions de déployer ces initiatives sur d’autres écoles…Où en êtes-vous ?

4. Enfin pour finir, je reviendrai sur certains axes de l’organisation du CCAS.

– Vous confirmez la place des Maisons Des Habitants au cœur des enjeux du développement local dans les quartiers, ainsi que l’accompagnement des initiatives collectives d’habitants pour la défense des droits. Nous encourageons bien sur ces orientations.

– Il était utile de renforcer la cohésion entre la ville et son CCAS. Nous l’envisagions aussi. Vous vous orientez vers une direction unique entre l’action territoriale et l’action sociale, nous verrons à l’usage si cela était le bon choix.

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– Vous souhaitez conforter le rôle d’instance de pilotage du Conseil d’administration du CCAS, et à cette fin vous créez un « bureau de l’action sociale ». Outre que cela rappelle le temps où en 1978 le CCAS se dénommait Bureau d’Aide Sociale, ne craignez vous pas que ce Bureau composé d’élus de la majorité et du directeur du CCAS, ne prenne pas la place des administrateurs et que le CA ne devienne plus qu’une chambre d’enregistrement ?.

– Enfin en termes de gestion interne des ressources humaines, il faut pouvoir assurer et assumer ces changements. Où en êtes-vous, alors que plusieurs syndicats du personnel du CCAS font état de manque de personnels dans le EHPAD et logement foyers, que vous n’assumerez pas l’objectif d’une Atsem par classe, et que la question de la précarité de l’emploi se pose encore pour de nombreux employés municipaux ?.

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Pour conclure il reste essentiel d’avancer vers la création d’un Centre Intercommunal d’Action Sociale au niveau de la Métropole.
L’action sociale n’est pas une compétence des intercommunalités. L’intérêt de gérer au niveau métropolitain des services comme le logement, les transports, l’eau ou les déchets est manifeste, car il existe une forte interdépendance entre les communes.
La difficulté en matière d’action sociale est qu’il s’agit de services de proximité : il n’y a pas a priori d’inconvénient à ce que chaque commune gère les crèches, les écoles ou les services à domicile aux personnes âgées pour ses propres habitants
Je crois que le transfert complet de la compétence sociale à l’échelle intercommunale risque d’être très difficile à réaliser mais qu’un transfert partiel peut présenter plusieurs avantages. Il peut permettre d’assurer une péréquation des moyens, ce qui est important car les besoins sociaux sont souvent répartis de manière inégale au sein d’une agglomération. Il peut faciliter la professionnalisation des travailleurs sociaux et des agents des centres d’action sociale. Enfin il peut simplifier  le travail de partenariat avec d’autres acteurs, comme le département ou la CAF. »

 

ABS 2014

Plan Stratégique du CCAS 2015

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